Immersion dans la ville de Kahnawake

La ville de Kahnawake

La ville de Kahnawake (Kahnawà:ke en Mohawk) est située au Sud-Ouest de Montréal. Elle est la plus grande réserve de Mohawks du Canada. D’ailleurs, lorsqu’on est dans Kahnawà:ke, on n’est plus en territoire Canadien. La ville est en territoire Mohawks. 

“Mohawks”, ça veut dire Kanienʼkehá꞉ka, en Canadien. Après avoir été déplacé quatre fois, la ville se trouve désormais à la pointe Nord de la réserve, elle-même faisant environ 50 km 2.

En se baladant dans la ville, on a comme l’impression d’être dans l’Amérique profonde. Les majorité des maisons semblent fragiles, même si quelques-unes ont l’air d’être vraiment bien construites. Les rues sont quasi-désertes avec quelques pick-up et 4×4 qui traversent la ville. Sur les lampadaires, des affiches célèbrent encore les héros de guerre Mohawks de la Seconde Guerre mondiale.

Ici, quelques fenêtres cassées, là, des bâtiments officiels Mohawks. 

En partant

En partant à la rencontre des habitants, on comprend assez vite que l’Histoire à laisser des traces dans les cœurs. L’office de tourisme ne présente pas le même tourisme que chez nous, blancs. Ici, l’office de tourisme est un étendard. En entrant, attendez-vous à retracer l’histoire de la région à travers les yeux d’une population qui a été dévastée par l’arrivée des blancs sur le continent américain et qui peine terriblement à s’en remettre. Chaque mot, chaque geste vous interrogera pour voir de quel côté vous êtes. Du côté blanc, ou du côté Mohawks ? La guerre se fait par les idées, et si vous n’êtes pas encore convaincu que ce peuple fut et se sent toujours opprimé, vous y trouverez tous les arguments pour mettre un peu de réalité dans votre appréciation de l’histoire et de la situation actuelle.

En janvier, un peu de neige vient adoucir l’ambiance et propose un paysage de carte postale qu’on aimerait ramener chez soi. Le silence, la neige, des cœurs brisés, l’endroit ressemble à un embryon de roman, alors qu’il concentre les pauvres restes de 12 000 ans de la vraie histoire de l’Amérique du Nord. Le canal, au Nord, est glacé, en été, il pourrait servir pour la population de Kahnawake, mais à l’office de tourisme on vous explique cela n’est plus possible car le gouvernement canadien à tout fait pour le rendre inutilisable. On ne peut même plus y pêcher.

Mis à part dans l’enceinte de l’office de tourisme, une méfiance déchirante règne dans les rues si vous trainez seul, sans groupe de touriste, et surtout si vous avez un appareil photo. On peut rapidement venir à votre rencontre pour vous faire comprendre qu’il faudrait faire attention à ce que vous faites, car ici, il se passe des choses. On ne voudrait pas vous confondre avec un agent des renseignements du Canada, alors, ne faites pas des photos des maisons, des gens, encore moins seul, dans les rues de Kahnawake. C’est G***, un homme d’une quarantaine d’années qui m’a aperçu dans la rue, alors il est sorti, pour me prévenir comme il dit. En sortant de chez lui, j’ai senti qu’il était un peu dérangé, à la fois voulant sortir pour me parler, et mal à l’aise de me parler. Sa démarche est honnête, très humaine, la même humanité que j’ai vu dans les yeux de B**** à l’office de tourisme, la même humanité que j’ai vu dans les yeux de cette femme, s’arrêtant en voiture prêt de moi et m’intérrogeant vigoureusement sur mes intentions en demandant confirmation à son voisin G***, lorsqu’elle à compris que j’étais simplement là pour découvrir leur culture. La même humanité qui, déchue de son essence, se méfie d’un autre Homme. Comme pour réparer ce morceau d’humanité perdu, la police s’appelle “Peacemaker” (les faiseurs de paix), comme pour coller à une tradition et des valeurs bien ancrées malgré l’Histoire.

La visite du musée

La visite du musée principal de la ville se trouve dans un bâtiment officiel Mohawk, a tel point qu’on pourrait croire que l’on se trompe. Il s’agit en fait d’une petite exposition de quelques panneaux, dans un open space. Douze mille ans d’histoire, résumés sur une petite dizaine de panneaux, un costume, quelques parures, un canoë. Douze mille ans d’histoire, et en face, Montréal, quatre cents ans d’histoire, plusieurs musées, écoles prestigieuses, banques nationales et building.

En sortant de la ville, en dessous du pont Mercier, quelques tags et inscriptions demandent aux habitants de parler s’ils voient quelques chose. “You see something, you say something” (si tu vois quelque chose, tu dis quelque chose), comme pour prévenir les habitants et le monde que l’oppression est encore d’actualité, que la mort n’est jamais bien loin, et la survie toujours le moteur de la nation.



Toutes les nouveautés directement dans votre boîte mail !

Envie de redécouvrir le monde,
Abonnez-vous à la NewsLetter !